Alors que le scrutin présidentiel approche, la question de la candidature du président Paul Biya crée une confusion inhabituelle au sommet de l’État camerounais. Deux ministres du gouvernement ont exprimé des positions divergentes sur le sujet, accentuant le flou autour des intentions du chef de l’État.
Une divergence ouverte au sommet
En l’espace de 24 heures, deux membres influents du gouvernement camerounais ont livré des déclarations contradictoires concernant la probable candidature de Paul Biya, 93 ans, à l’élection présidentielle prévue pour octobre.
Lundi, sur l’antenne de RFI, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, René Emmanuel Sadi, a évoqué une équation encore incertaine, estimant les chances de candidature du président sortant à « 50/50 ». Cette déclaration, largement commentée dans la presse locale, a suscité étonnement et interrogations dans les cercles politiques et sur les réseaux sociaux.
Quelques heures plus tard, Jacques Fame Ndongo, secrétaire à la communication du RDPC (parti au pouvoir) et ministre d’État chargé de l’Enseignement supérieur, a réagi vivement. Selon lui, « Paul Biya est le candidat du parti, et de manière absolue ». Il a ajouté que « le président va l’annoncer bientôt », sans toutefois préciser sous quelle forme cette annonce sera faite.
Un silence qui interroge
Le président Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, n’a toujours pas exprimé publiquement ses intentions. Son silence, à moins de trois mois du scrutin, alimente les spéculations. D’autant plus que le RDPC n’a convoqué ni congrès, ni instance formelle pour désigner un candidat.
Cette situation inédite a engendré ce que certains observateurs qualifient de « cacophonie institutionnelle ». L’ancien ministre Michel Ange Angouing, dans une tribune publiée mardi, a invité le président à « briser le silence », estimant qu’une prise de parole de sa part « rassurerait le peuple et clarifierait la direction à suivre ».
Une opposition moqueuse, une majorité désorientée
Dans les rangs de l’opposition, les réactions ne se sont pas fait attendre. Hilaire Zipang, candidat du Mouvement progressiste, a déclaré que cette situation « illustre l’incapacité du RDPC à anticiper l’avenir sans Paul Biya ». Il y voit une preuve supplémentaire de la fragilité du système présidentiel actuel, centré autour d’un seul homme.
D’autres voix critiquent le manque de transparence et de vision au sein du parti au pouvoir, évoquant un contexte de plus en plus tendu à l’approche du scrutin. Le RDPC, affirment certains analystes, semble en panne d’alternative politique crédible, ce qui pourrait ouvrir des brèches pour l’opposition.
Une couverture médiatique contrastée
La presse nationale s’est largement emparée du sujet. Cameroon Tribune, Émergence, L’Indépendant et L’Info à chaud ont titré sur la confusion née des propos du ministre Sadi. Le quotidien L’Info à chaud a même juxtaposé les déclarations « 50/50 » et « 100% » pour illustrer ce qu’il qualifie de « cacophonie au sommet ».
Dans un climat politique déjà tendu, marqué par des défections au sein du RDPC et une opposition de plus en plus active, la question de la candidature de Paul Biya pourrait bien devenir le facteur décisif de cette présidentielle.